Je ne vends pas des armes, ni à l’Ukraine, ni à personne

J’interviens ici pour donner quelques éléments spécifiquement sur ma réaction face à la guerre en Ukraine. Il y a eu un article de Daniel Fleury (1), et un de Dominique Vidal (2). J’y ai vu des choses qui sont partielles. Pour vous dire d’emblée, je me situe là où l’on voit la société industrielle, avec son tout premier produit : les armes. De cet observatoire je réagis ainsi : en tant que citoyen français, je ne vends pas des armes à l’Ukraine, ni aux russes, ni à personne. Les journalistes disent “livrer des armes“, “envoyer des armes“. Non. Le mot réel, c’est vendre. Je ne fais pas ça. Personne ne m’y obligera.

Je lis dans l’article de D. Vidal que Zelensky n’aurait pas agressé la Russie. Il y a trois réponses à cela. La première, c’est que les 13000 morts russophones au Donbass depuis 2014 représentent une certaine agression (voir les travaux de la reporter Anne Laure Bonnel, entre autres). La deuxième, c’est l’article du journal algérien “Le Jeune Indépendant” du 19 février “Ukraine: Zelensky lance sa guerre contre les civils du Donbass” (3). Le 15 février, l’O.S.C.E. a enregistré 41 violations du cessez-le-feu alors que les forces de Kiev commençaient à bombarder le Donbass. Le 18 février, 654 violations. Le 19 février 1413 violations. Les 20-21 février 2026 violations… Le 24 février, les russes sont intervenus (pour les chiffres voir (4)). Alors vous me direz peut-être : c’est un peu comme quand les Algériens tuaient des civils français pour en finir avec la colonie. Qu’a fait l’Etat français face à cela ?  Que peut-on faire dans pareille situation ? Enfin, il y a la déclaration du président ukrainien du 14 février 2022 qui réaffirmait que son pays voulait adhérer à l’O.T.A.N. Il faut bien comprendre que cela signifierait des missiles ballistiques nucléaires à 5 minutes de Moscou : pas le temps de riposter. Nous sommes dans une configuration similaire à celle de la crise de Cuba de 1962.

Pour bien expliquer ce que je vois, voici une carte de l’O.T.A.N. depuis la chute de l’U.R.S.S. :

J’ai écouté Roland Dumas, ancien Ministre des Affaires Étrangères, “Comment l’Occident a promis à l’URSS que l’O.T.A.N. ne s’étendrait pas“(4). D’accord pour l’impérialisme russe. Mais qui va stopper l’impérialisme américain ?« Nous ne menaçons personne…  Nous avons clairement fait savoir que tout nouveau mouvement de l’O.T.A.N. vers l’est était inacceptable. Il n’y a rien d’obscur à ce sujet. Nous ne déployons pas nos missiles à la frontière des États-Unis, mais les États-Unis déploient leurs missiles sous le porche de notre maison. Est-ce qu’on en demande trop ? Nous demandons simplement qu’ils ne déploient pas leurs systèmes d’attaque jusque chez nous… Qu’y a-t-il de si difficile à comprendre ?» (5)

Je lis également chez D. VIdal que la crise en Ukraine serait due à la seule personnalité de Poutine. Les médias de masse le présentent tellement fou et diabolique qu’il aurait fait sauté ses propres gazoducs paraît-il. Il est probable que Mikhail Khordokovsky se comporterait différemment vis-à-vis de l’O.T.A.N. (6). La caractéristique essentielle de la guerre est bien de faire la négation de l’autre, de son intelligence, de ses intérêts propres. Je n’oublie pas que la part russe dans la libération de l’emprise nazie sur le monde est une dette qu’ils ont payée à hauteur de 26 millions de morts. Comprendre l’autre n’est pas justifier son agressivité. Au final, si l’on cherche à savoir qui a agressé qui en premier, on s’en sortira pas. il n’y a qu’une seule chose qui compte pour moi : dois-je vendre des armes ou pas ? Ma réponse est : décidément, non. À bas tous les marchands d’armes.


Frédéric Boutet


Promenade bibliographique :

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